Calotype, ou papier ciré sec ?
“(…) Voici, Monsieur, dans
tous ses détails, le procédé que j'ai employé pour la plupart de mes épreuves
des Pyrénées. Je me hâte d'ajouter cependant que plusieurs ont été faites sur
papier ciré, vu que j'emploie concurremment ces deux procédés, et que, loin de
s'exclure, ils se complètent, selon moi, l'un par l'autre. Si le procédé Talbot
donne plus de finesse de détails, comme tous les procédés où l'image est à
l'extrême surface, le papier ciré, et j'aime à le dire à l'honneur de M.
Legray, qui a fait une découverte réelle et une publication consciencieuse, le
papier ciré a sur l'autre l'avantage d'être bien plus constant, bien moins
susceptible, et d'être possible avec tous les papiers, tandis que l'autre ne
l'est qu'avec les papiers anglais. Le papier ciré se conserve sensible jusqu'à
un mois entier, le papier Talbot, nous laisse à peine un jour dans les grandes
chaleurs. Une minute de trop dans la pose perd une épreuve sur Talbot, cinq ou
six minutes de trop ne nuisent pas d'une manière appréciable à un papier ciré.
Pourquoi donc opter entre ces deux procédés, si différents dans leur théorie et
dans leurs avantages? Il faut se rendre maître des deux et les compléter l'un
par l'autre. L'un vous permettra de faire pour huit jours une abondante
provision de papiers tout sensibilisés, l'autre de diminuer considérablement le
temps de la pose, si vous y trouvez un avantage. Avec le papier ciré, vous
obtiendrez des résultats constants, presque infaillibles, des négatifs plus
faciles à tirer et moins susceptibles de se tâcher : avec le papier Talbot,
vous aurez, d'autre part, des résultats peut-être plus parfaits comme finesse,
comme transparence dans les ombres, comme éclats de contrastes et comme vérité
de plans et de perspective aérienne.
Je n'ai pas voulu me borner
à la mention pure et simple des proportions que j'emploie : j'ai cru devoir y
ajouter, sur la pose et sur le mode de sensibiliser, quelques observations
acquises pour moi par l'expérience et que je crois essentielles pour pouvoir
réussir partout, en variant ses préparations suivant les différentes conditions
où l'on peut se trouver. Je regretterais moins la longueur de ces détails,
s'ils pouvaient éviter, à ceux qui essayeront, une partie des insuccès que j'ai
subis sans me décourager, avant de bien m'approprier un procédé qui ne manque
pas d'une certaine difficulté.
Veuillez, Monsieur, etc.,
etc.”
Vicomte J.
Vigier, La Lumière, 15 avril 1854, p. 54.